L’urbanisme, vecteur de transitions – Franck Boutté : Grand Prix de l’urbanisme 2022

Cet ouvrage consacré à Franck Boutté (Grand Prix de l’urbanisme 2022) et réalisé par Ariella Masboungi (architecte-urbaniste et Grand Prix de l’urbanisme 2016) et Antoine Petitjean (architecte-urbaniste), est paru aux Éditions Parenthèses dans la collection “Projet urbain” (256 p.). Ses réalisations démontrent qu’il est possible de proposer des projets énergétiquement plus sobres, plus résilients face au changement climatique, mais aussi plus agréables à vivre.

Résumé du livre “L’urbanisme, vecteur de transitions” consacré à Franck Boutté

Ingénieur formé à l’architecture, Franck Boutté est de ceux qui considèrent l’environnement comme faisant partie intégrante des processus d’aménagement. C’est d’abord à ce titre, et pour saluer la qualité de ses interventions dans des projets emblématiques tels que ceux de l’Île de Nantes, des villes et quartiers marocains d’Anfa et Zenata, avec Bernard Reichen, ou de Bordeaux Euratlantique que le jury du Grand Prix de l’urbanisme l’a choisi pour lauréat 2022.

Mais ce choix tient également à l’originalité de sa démarche, qui associe la rigueur de la méthode scientifique et la souplesse de l’adaptation aux contextes territoriaux. S’appuyant sur la première, il identifie très en amont la spécificité écologique et le profil énergétique des territoires au travers d’une approche matricielle garante de cohérence entre les échelles ; quant à la seconde, elle prend corps sous la forme d’un urbanisme négocié et co-construit, soucieux des usages, misant sur le principe de mutualisation, entre autres énergétique, à l’origine de nouvelles réciprocités urbaines et territoriales.

Portraits et entretiens de Franck Boutté et des sélectionnés

Sep voix fortes porteuses, chacune à leur manière, de transitions souhaitables, pour un Grand Prix qui, année après année, explore les facettes d’un monde professionnel de plus en plus rétif à la standardisation.

Retrouvez ci-dessous les portraits et interviews du lauréat et des 6 autres candidats sélectionnés pour le Grand prix.

  • Franck Boutté : “Ingénieur environnementaliste, urbaniste et Grand prix de l’urbanisme 2022”

Franck Boutté (né le 27 avril 1968), a fondé une agence de conception et d’ingénierie environnementale, Franck Boutté Consultants. Son agence développe depuis plus 15 ans des concepts et méthodologies, des stratégies et des solutions concrètes visant à améliorer la soutenabilité et l’habitabilité des territoires et des bâtiments, en intervenant à toutes les étapes des projets et à toutes les échelles, dans une approche à la fois contextuelle et soucieuse d’effets induits positifs sur leur territoire d’accueil.

Pierre Veltz dit que Franck est l’explorateur des temporalités et des spatialités multiples. Il a un parcours exemplaire d’un praticien, urbaniste et ingénieur formé à l’architecture et non architecte (puisqu’il n’a pas passé son diplôme).

Il a été l’un des premiers à comprendre que la question environnementale ne pouvait pas constituer simplement un chapitre ou une annexe verte dans les projets, mais impliquer une redéfinition profonde des métiers de la conception.

Franck a organisé son livre en un parcours de 12 explorations :

  1. La ville dessinée par la contrainte (frein mais aussi levier pour inventer de nouvelles voies),
  2. Le calcul comme boussole (désidéologiser et objectiver les débats sur la ville),
  3. L’écologie du Sud (fondée sur le climat, l’histoire, la culture, la solidarité et la convivialité),
  4. Le Sud comme horizon (apprendre des Sud pour une habitabilité 2050-2100),
  5. L’OUDUPO (méthode de coconstruction et ouvroir de durabilité potentielle),
  6. Du Bepos et Tegpos (du bâtiment à énergie positive au Territoire à Énergie Globale Positive),
  7. Réversibilité multiple (penser dès à présent l’évolutivité d’un territoire),
  8. Équité territoriale et gouvernances renouvelées (fondée sur des relations de synergies),
  9. Explorations paramétriques (pour anticiper sur les situations contextuelles futures),
  10. Métabolisme urbain (agréger les risques dans une vision globale cohérente),
  11. La part inconstructible des territoires (structurer l’urbain autour de la nature/agriculture),
  12. Le commun comme projet (partager les diagnostics et construire ensemble l’avenir).

Ce travail, guidé par une recherche constante de résilience, de sobriété et de moyens pour protéger les villes du réchauffement climatique, entre en dialogue avec celui des six personnalités et collectifs sélectionnés cette année :

  • Dominique Alba : “Architecte-Urbaniste et Directrice des ateliers Jean Nouvel

Elle a menée une carrière libérale puis elle a conseillé l’ancien Maire de Paris, Bertrand Delanoë, ensuite elle a dirigé le Pavillon de l’Arsenal et l’Atelier Parisienne d’Urbanisme (APUR) pour enfin rejoindre les ateliers Jean Nouvel comme directrice générale. 

Dominique Alba a fait un grand travail de données, un travail très important que mène les agences, en particulier sur la question climatique et énergétique et notamment sur Paris où il y a eu un travail îlot par îlot pour savoir quelle méthode adoptée.

Dans son entretien, elle évoque notamment, le rôle de la connaissance au profit du déjà-là, pour rendre “Plus belle la ville et plus durable”. Elle résume cette notion en ces quelques mots : “Il s’agit de connaître pour décrire, de décrire pour comprendre et de comprendre pour agir ensemble”.

  • Nicolas Détrie : Urbaniste, entrepreneur social et Directeur de Yes We Camp”

Nicolas Détrie est le co-fondateur de Yes We Camp, qui est sans doute la première agence d’urbanisme transitoire en France. Elle mène des expériences in situ, participatives, inclusives et qui proposent un changement radical de la manière dont on fait l’urbanisme et un travail beaucoup plus près du terrain et des gens notamment sur la question l’intégration des immigrés.

Il a d’abord dirigé les Ateliers de Cergy, structure qui invitent les étudiants du monde entier à imaginer des projets en France et à l’étranger.

Il part d’un urbanisme de bifurcation : “L’urbanisme est l’art du partage des espaces ; à nous de faire de nouveaux choix fondés sur une compréhension des torts causés par la pratique actuelle, à commencer par les deux privations collectives : la limitation d’accès et la limitation d’invention”.

Sébastien Marot, philosophe et enseignant à l’École d’architecture de la ville & des territoires à Marne-la-Vallée mais aussi auteurs de très nombreux ouvrages. Il aimerait d’ailleurs créer une école d’architecture à la campagne.

Pour les urbanistes, il est quelqu’un d’extrêmement important car il a beaucoup travaillé sur le paysage, il dirigeait la revue Le visiteur, mais surtout il a inventé la notion de sub-urbanisme au milieu des années 1990. C’est à la fois au-delà de l’urbanisme, c’est penser le projet avant le programme, partir du site mais c’est aussi l’après-urbanisme. D’une certaine façon il propose d’abandonner le terme d’urbanisme car il qualifie le fait de construire et d’agrandir les villes.

Selon lui, le concept de Translation, de l’extension des villes à l’approfondissement des territoires doit suivre 4 principes pour imaginer les projet de demain : “mémoire et qualité du site ; vision en épaisseur et en volume des espaces ouverts ; analyse du site comme relations ; processus de métabolisme”.

Claire Schorter, a beaucoup travaillé avec des grandes agences (Paul Chemetov, Reichen et Robert & associés) et ensuite elle créé son équipe LAQ. Elle gagne deux projets importants, l’un à Lille, qui ne se réalisera jamais du fait de portages politiques, l’autre à l’Ile de Nantes, où elle exerce avec Jacqueline Osty (Grand Prix de l’Urbanisme 2020).

C’est quelqu’un qui croit aux grand tracés mais qui doit s’articuler avec l’urbanisme sensible. Elle travaille avec Patrick Bouchain sur Roubaix et Yann-Gaël Guitteny à Nantes.

Elle cherche à défendre le rapport ville-agriculture en travaillant sur la première couronne des villes qui doivent être nourricières. Selon elle, pour Réparer les métropoles : “Il est crucial de s’atteler à la résilience alimentaire de nos métropoles, cela conditionne la réduction de notre empreinte carbone et notre survie en cas de crise énergétique et politique”.

  • Simon Teyssou : Architecte-Urbaniste – Atelier du Rouget et Directeur de l’école d’architecture de Clermont-Ferrand”

Simon Teyssou, a souhaité s’ancrer dans un territoire, à Clermont-Ferrand. Il est Directeur de l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Clermont-Ferrand. Il travaille sur le monde rural et il démontre que l’on peut densifier sans construire, puisqu’on peut réhabiliter les logements, transformer des granges en tiers-lieux et réutiliser l’espace public.

C’est une sorte d’urbanisme de fragment (de petite taille en zone périurbaine) qu’il défend au même titre que l’art d’aménager les territoires, par une compréhension profonde des territoires sur lesquels il intervient et un rapport de proximité aux élus, aux acteurs et aux habitants. Ce qui est intéressant, c’est que quand il arrive avec une petite commande, il fait le schéma directeur de la ville pour aider à affronter toutes les questions écologiques ensemble pour créer un territoire vivable.

Il propose un récit alter urbain : “La crise écologique et budgétaire suggère de hiérarchiser les actions et de saisir chaque opportunité pour amender les lieux. Faire le plus possible AVEC et le moins possible CONTRE. Faire donc avec ménagement et délicatesse”. 

  • TVK (Pierre Alain Trévelo et Antoine Viger-Kohler) :Architectes-Urbanistes”

TVK est une agence d’architecture et d’urbanisme internationale. Pierre Alain Trévelo et Antoine Viger-Kohler se sont rencontrés au moment de leur diplôme sur le périphérique parisien. Ils sont arrivés à en faire un livre et puis ils se sont beaucoup investis sur la question des infrastructures puisqu’ils ont mené de nombreux projets (la Porte Pouchet et la place de la République à Paris…). Récemment, ils ont sorti un livre et ils ont été exposés à la biennale de Venise en 2021 à propos de : “La terre est une architecture”.

Ils ont titré leu autobiographie scientifique L’imprévisibilité du monde, un programme qui nécessite d’être scénarisé : “Nous héritons de nombreuses situations urbaines où les infrastructures qui parcourent nos villes en façonnent le relief, le plissent, le perforent et produisent autant de ruptures à franchir que de situations à exploiter”.

A propos du Grand Prix de l’urbanisme

Créé en 1989, le Grand Prix de l’urbanisme distingue chaque année une personnalité reconnue par un jury international. Il valorise l’action des professionnels qui contribuent à faire avancer la discipline et à améliorer le cadre de vie des habitants de tous les territoires.

Cette année, le jury a désigné Franck Boutté pour sa démarche pionnière sur l’ingénierie environnementale des projets architecturaux, urbains et territoriaux. Sa double approche d’ingénieur et de concepteur, et son positionnement de conseil et d’assistance à maîtrise d’ouvrage, lui permettent de réinterroger les projets à l’aune de solutions innovantes mais aussi contextuelles voire vernaculaires.

Réuni le 29 juin 2022 à l’initiative du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires et du ministère en charge de la Ville et du Logement, le jury a décerné le Grand Prix de l’urbanisme à Franck Boutté, ingénieur des ponts et chaussées, formé à l’architecture.

Retrouvez l’intégralité  :

  • Du discours de Franck Boutté, lauréat du Grand Prix de l’urbanisme 2022

  • De la cérémonie du Grand Prix de l’urbanisme et du Palmarès des jeunes urbanistes 2022

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