La France urbaine est avant tout une France de ruraux déracinés

Dans un débat à retrouver dans la revue Urbanisme, Catherine Sabbah, déléguée générale de l’Institut des hautes études pour l’action dans le logement (Idheal), et Thibault Tellier, professeur d’histoire contemporaine à Sciences-Po Rennes, retracent ensemble l’historique des lois et des politiques pour le logement depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. L’occasion de constater que si les aspirations des Français en matière d’habitat sont demeurées constantes, décennie après décennie, les prix n’ont, eux, jamais cessé de grimper.

Question 1 : Dans toutes les enquêtes d’opinions, les Français déclarent qu’un de leurs principaux objectifs dans la vie est de devenir propriétaire. Ce désir collectif de posséder son logement est-il récent dans l’histoire de notre pays ou remonte-t-il à loin ?
  • Thibault Tellier : “Il ne faut pas non plus oublier que la France est restée très longtemps une nation paysanne, jusqu’aux années 1930, et que celle-ci se signale par un fort attachement à la propriété privée. Il faut aussi avoir à l’esprit que la propriété est une question éminemment politique (…). L’idée, c’est qu’une France de propriétaires votera davantage pour les partis conservateurs que révolutionnaires, qui appellent au contraire à l’abolition de la propriété”.
  • Catherine Sabbah : “On observe qu’au sortir de la Seconde Guerre mondiale et surtout depuis les années 1970, les politiques publiques encouragent la propriété. C’était aussi une manière pour l’État de transférer le financement de la production de logements sur les ménages. Sans oublier le statut social, traditionnellement associé à une forme de réussite, que confère la propriété. C’est un graal dont on a du mal à se défaire. La France n’est pas la seule concernée puisque le libéralisme et le capitalisme des pays occidentaux ont encouragé cet accès à la propriété depuis plus de quarante ans“.
Question 2 : Cet idéal a‑t-il encore un sens quand on sait que, depuis vingt-cinq ans, la production de logements neufs est majoritairement vendue à des investisseurs-bailleurs ?
  • Catherine Sabbah : “Si l’on suit la courbe de production, ce n’est pas la majorité mais plutôt la moitié, avec des variations en fonction des lois fiscales qui accompagnent l’accession à la propriété de locataires bailleurs, qui achètent un logement pour le louer et bénéficier d’une réduction d’impôt”.
  • Thibault Tellier : “Avec la loi ELAN, on observe aussi une volonté de favoriser la revente des HLM, souvent pour des raisons de financement de la rénovation urbaine, mais pas seulement. L’idée reste de faire accéder beaucoup plus de gens modestes à la propriété”.

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